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Forêt, 2010, Eva Jospin - Carton - Collection Musée de la Chasse et de la Nature

Promenez-vous dans les bois et le loup y sera. Insolite visite au Musée de la Chasse et de la Nature où l'on croise dans les salons et boudoirs des animaux et œuvres d'art. Claude d'Anthenaise Conservateur général, développeur d'une " écologie humaniste ", propose une muséographie originale en plein coeur du Marais, un îlot singulier où les animaux investissent le territoire des hommes. Elégant écrin aux allures sauvages, toutes les natures s'y côtoient. Familière sensation d'être chez soi, l'homme retrouverait-il le sens de son animalité dans un musée ? Sous vos pieds les parquets crissent, à moins que ce ne soient les bruits d'une forêt ? Car tout y fait songer, la "salle du sanglier, le coin du loup ou la galerie des trophées"... Les mobiliers deviennent des cabinets de curiosités où l'on piste étonné des laissées reconstituées. A peine remarqué, le renard roux sommeille en rond sur un fauteuil de velours. Et sans y penser direction vers le salon de compagnie qui fait du bruit... 

Le loup discret est déjà à vos côtés, à vos pieds. Il est votre hôte et invite à vous languir dans son salon, à y séjourner, longtemps. C'est là que prend la pose, le célèbre chien de Jeff Koons, l'air de rien. Plus loin ses empreintes dans la terre... tel un promeneur solitaire, vous errez sans repère. Un sombre recoin étonnant attire irrésistiblement. Diane chasseresse y est l'inspiratrice d'une nuit de plumes sous le regard de verre d'un hibou messager de sa mort (Jan Fabre 2006). Un "Dieu de la forêt", habillé pour Balenciaga d'écorce de bouleau, se cache dans l'obscur monde des licornes (Janine Janet 1957). Bientôt, des cornes de cerf plantées au plafond donnent l'impression d'étranges menaces. Des siècles de chasse de trophées immortalisés, têtes d'animaux familiers ou exotiques accumulées, prennent de la hauteur et contemplent leur revanche sur de piètres existences. Et naturellement vous cheminez, accompagnés des veilleurs du palais. Bienveillants, ils jouent les guides. Parfois ils content des histoires lorsque subjugués vous tombez nez à nez avec un ours blanc et au même moment une carcasse de voiture abandonnée à la volière aux oiseaux surprend, comme la présence encombrante de l'homme.
 

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La voiture aux oiseaux, 2007, Vincent Dubourg

Au sommet de l'aventure, le gorille naturalisé annonce presque la fin du périple après avoir croisé Zarafa "première girafe de France" icône exotique légendaire. Une "machine désirante" garnie de boutons poussoirs incite à produire des sons, cris de Faisan de Colchide, Hibou petit duc ou Geai des chênes résonnent alors dans la forêt d'Eva Jospin, œuvre d'arbres contemporains. Tout en carton, d'une impressionnante minutie, telle une perspective de précision, elle fascine à la contemplation. L'ambiance est bucolique. La fin est proche, la cabane des Sommer, couple de passionnés et maîtres fondateurs des lieux, livre ses secrets, cachée au fond de la forêt. Collectionneurs et mécènes, ils continuent de hanter les murs du Musée magistralement conservé et réinventé. A découvrir sans tarder.
 

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Fables, 2008, Karen Knor  Musée de la Chasse et de la Nature

"Le ressort habituel des fables consiste à prêter aux animaux les conventions des hommes. La figure métaphorique de l’animal permet ainsi une approche critique de l’humanité. Mais il semble bien que les Fables de Karen Knorr aient un autre objet. Les animaux y évoluent avec naturel dans le territoire des hommes. Pas n’importe quel territoire, mais précisément celui qui devrait résolument leur rester interdit, qu’il s’agisse de salles de musée ou d’autres » sanctuaires culturels » que l’on veut habituellement protéger de la profanation des bêtes. Bien que pacifique, l’intrusion des bêtes subvertit l’institution et met en évidence son caractère » contre nature ." 

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